Mois : juin 2025

J’irai cracher sur vos tombes

Album publié en 2020 aux éditions Glénat.


Résumé éditeur

D’après l’œuvre de Boris Vian publiée le 21 novembre 1946.

couverture bd J'irai cracher sur vos tombes

« J’avais toutes les filles les unes après les autres, mais c’était trop simple, un peu écœurant. »

Lee Anderson, vingt-six ans, fils d’une métisse, quitte sa ville natale après la mort de son frère noir, lynché parce qu’il était amoureux d’une blanche.
Il échoue à Buckton, petite ville du Sud des États-Unis où il devient gérant de librairie. Grand, bien bâti, payant volontiers à boire et musicien de blues émérite, Lee parvient sans mal à séduire la plupart des adolescentes du coin.
Auprès d’une petite bande locale en manque d’alcool mais très portée sur le sexe, il mène une vie de débauche. Sans toutefois perdre de vue son véritable objectif : venger la mort de son frère.

Bien éloigné des romans habituels de Boris Vian, ce récit est probablement le plus violent, le plus cru et en même temps le plus représentatif du style « Vernon Sullivan ». À travers une histoire âpre où la sexualité, violente, est omniprésente, Vian dénonce le racisme ambiant et la condition précaire des Noirs dans le Sud des États-Unis.

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L’avis d’histoiregeobd.com sur la bande dessinée « J’irai cracher sur vos tombes »

À l’occasion du centenaire de Boris Vian, Jean-David Morvan et ses complices graphiques (Rey Macutay, Rafael Ortiz et Scietronc) offrent une adaptation saisissante du plus sulfureux des romans signés Vernon Sullivan. Cette transposition en bande dessinée conserve toute la puissance subversive de l’œuvre originale publiée en 1947, qui avait fait scandale pour sa violence et son érotisme cru.

L’histoire de Lee Anderson, ce métis à la peau claire venu venger dans le Sud ségrégationniste américain son frère lynché pour avoir aimé une femme blanche, prend ici une dimension visuelle percutante.
Les dessinateurs parviennent à recréer l’atmosphère étouffante de Buckton, cette bourgade où Lee, devenu libraire et musicien de blues, séduit méthodiquement la jeunesse locale dans un tourbillon d’alcool et de débauche, tout en poursuivant implacablement sa vengeance.

extrait bd J'irai cracher sur vos tombes

Le trait sans concession, parfaitement maîtrisé, traduit admirablement la tension narrative et la brutalité latente du récit. La mise en scène dynamique modernise efficacement l’œuvre tout en respectant sa dénonciation du racisme et sa représentation sans filtre de la violence.

Cette adaptation réussit le pari difficile de transposer l’univers de Boris Vian/Vernon Sullivan sans en édulcorer ni la forme ni le fond. Une œuvre dérangeante, certes pas destinée à tous les publics, mais qui ravira les amateurs de romans graphiques puissants et les admirateurs de Boris Vian désireux de redécouvrir son versant le plus noir.

La Vengeance d’une femme

Album publié en 2009 aux éditions Emmanuel Proust.


Résumé éditeur

Adapté de la nouvelle de Jules Barbey d’Aurevilly publiée novembre 1874 (au sein du recueil Les Diaboliques).

couverture bd La Vengeance d'une femme

« … Elle avait combiné la transparence insidieuse des voiles et l’osé de la chair, avec le génie et le mauvais goût d’un libertinage atroce, car, qui ne le sait ? en libertinage, le mauvais goût est une puissance… »

Paris, XIXe, un dandy libertin est attiré par une femme d’une étrange beauté… Celle-ci lui avoue être en réalité une duchesse espagnole qui, en se prostituant, élabore la plus raffinée des vengeances.
Honneur, amour, châtiment, sont les thèmes de cette nouvelle de Jules Barbey d’Aurevilly extraite du recueil Les Diaboliques (1874), et qui devient, en bande dessinée, sous le trait sensuel du jeune dessinateur Lilao, un portrait de femme si moderne et si ambigu. Soit un roman graphique magnifique à la croisée du romantisme, du fantastique et du symbolisme décadent.


L’avis d’histoiregeobd.com sur la bande dessinée « La Vengeance d’une femme »

Fabrice Lilao, professeur d’arts plastiques titulaire d’une maîtrise sur le dandysme, signe avec La Vengeance d’une femme une adaptation remarquable de la célèbre nouvelle de Jules Barbey d’Aurevilly extraite des Diaboliques (1874). Cette bande dessinée de 92 pages, publiée en 2009 aux éditions Emmanuel Proust dans la collection Atmosphères, transpose avec intelligence l’univers sulfureux et romantique de l’auteur normand.

La BD explore les thèmes centraux de la nouvelle de Jules Barbey d’Aurevilly : la vengeance féminine, l’honneur bafoué et la déchéance volontaire comme arme de destruction sociale. Fabrice Lilao préserve la substantifique moelle narrative en conservant l’esprit comme la lettre de l’œuvre originale, tout en effectuant des coupes judicieuses pour adapter le texte au medium graphique. La duchesse d’Arcos de Sierra Leone, prostituée par choix vengeur, conserve toute sa complexité psychologique dans cette transposition visuelle.

extrait bd La Vengeance d'une femme

Le choix esthétique du noir et blanc s’avère pertinent pour restituer l’atmosphère mélancolique et sombre de cette histoire tragique. Les cases immenses permettent une lecture fluide tandis que l’imagerie très XIXe siècle colle parfaitement à l’époque romantique évoquée. Le trait de Fabrice Lilao capture la sensualité et la noblesse déchue des personnages.

Cette adaptation constitue un pont réussi entre littérature classique et bande dessinée contemporaine, permettant aux lecteurs découvrant Jules Barbey d’Aurevilly un accès privilégié à son univers. A noter : l’inclusion du texte intégral en fin d’ouvrage.

How I live Now – Maintenant, c’est ma vie

Bande dessinée publiée en 2021 aux éditions Glénat.


D’après le roman de Meg Rosoff  publié le 4 aout 2004.

couverture bd How I live Now

Hors du temps, loin du monde.

Elisabeth préfère qu’on l’appelle Daisy. Au prétexte de la guerre qui s’annonce, cette new-yorkaise de 15 ans en conflit avec son père et sa nouvelle compagne est envoyée au fin fond de la campagne anglaise, chez une tante et des cousins qu’elle ne connait pas. Edmond, Piper, Tante Penn, Isaac et Osbert l’accueillent avec une gentillesse désarmante et ce nouveau cadre familial déstabilise Daisy avant de la charmer, lui faisant presque oublier la mort de sa mère…
Et, surtout, il y a l’amour naissant entre elle et Edmond. Cette bulle presque rêvée prend fin brutalement à l’apparition d’une guerre que l’on ne voit pas, mais dont l’écho transforme leur vie en chaos. Daisy n’aura alors de cesse de retrouver sa nouvelle famille, et son Edmond.

Récit transpirant la tendresse et l’affection portée à cette période qu’est l’adolescence, How I live Now est une aventure sensible et humaine. Adaptation du livre éponyme de Meg Rosoff déjà transposé au cinéma, elle évoque en bande dessinée le travail de Charles Forsman (The End of the F***ing World ou I am not okay with this) et s’habille d’une douce mélancolie qui provoque autant l’apaisement que le désarroi.


L’avis d’histoiregeobd.com sur la bande dessinée « How I live Now »

Adaptation sensible du roman de Meg Rosoff, « How I Live Now » nous plonge dans l’univers de Daisy, une adolescente new-yorkaise de 15 ans envoyée en Angleterre chez une tante et des cousins qu’elle ne connaît pas, alors qu’une guerre mondiale menace.

Lylian signe un scénario d’une remarquable justesse psychologique, capturant le passage brutal de l’adolescence à l’âge adulte dans un contexte apocalyptique. Le récit oscille habilement entre la douceur des premiers émois amoureux de Daisy pour son cousin Edmond et l’horreur d’un monde qui s’effondre autour d’eux. Cette tension narrative confère à l’œuvre une profondeur rare.

extrait bd How I live Now

Le trait délicat de Christine Circosta s’avère parfaitement adapté à cette histoire sensible. Sa palette chromatique évolue subtilement, passant des teintes lumineuses et chaleureuses du cocon familial aux tons plus sombres quand la réalité de la guerre s’impose. Chaque planche respire cette « douce mélancolie » qui caractérise l’ensemble de l’album.

Cette bande dessinée touchante séduira les lecteurs en quête d’émotions authentiques, notamment les adolescents et jeunes adultes sensibles aux récits initiatiques. Une réussite qui parvient à parler de guerre et d’amour avec la même intensité.

Le joueur d’échecs

Album publié en 2017 aux Editions Casterman.


Adapté du roman de Stefan Zweig (publié pour la première fois le 7 décembre 1942).

Les premiers pas furent un fiasco, je n’arrêtais pas de m’embrouiller, cinq, dix, vingt fois, je dus reprendre le début de la partie. Mais j’avais tout mon temps…
Moi, l’esclave du néant…


1941. Dans les salons feutrés d’un paquebot en route pour l’Argentine, le champion du monde d’échecs affronte lors d’une ultime partie un aristocrate viennois, dont l’incroyable maîtrise du jeu est née dans l’antre de la tyrannie.
Cette dénonciation poignante et désespérée de la barbarie nazie est le dernier texte écrit par Stefan Zweig avant son suicide.


L’avis d’histoiregeobd.com sur la bande dessinée « Le joueur d’échecs »

Publié chez Casterman en octobre 2017, Le Joueur d’échecs de David Sala constitue une adaptation de la dernière nouvelle de Stefan Zweig, écrite en 1942 juste avant le suicide de l’auteur autrichien. Cette œuvre transpose avec l’ultime cri d’alarme de Stefan Zweig contre la barbarie nazie dans l’univers de la bande dessinée contemporaine.

L’adaptation de David Sala respecte fidèlement la structure narrative complexe de Stefan Zweig, articulant la confrontation entre Czentovic, champion du monde d’échecs brutal et ignorant, et Monsieur B., aristocrate viennois dont la maîtrise exceptionnelle du jeu naît de son emprisonnement par la Gestapo. 
David Sala parvient à retranscrire la dimension psychanalytique du récit original, explorant avec finesse les mécanismes de résistance intellectuelle face à l’isolement et à la torture psychologique. La folie progressive de Monsieur B. trouve une traduction visuelle particulièrement saisissante dans les séquences où les pièces d’échecs envahissent littéralement l’espace graphique.

David Sala, formé à l’École Émile Cohl, déploie dans cette adaptation une technique d’aquarelle inspirée des maîtres viennois Gustav Klimt et Egon Schiele. Ses grands aplats de couleurs évoquent l’univers des post-impressionnistes Nabis, tandis que ses détails géométriques et floraux rappellent l’esthétique de la Sécession viennoise
Cette approche stylistique n’est pas fortuite : elle constitue un hommage délibéré à ce que les nazis qualifiaient d’« art dégénéré », transformant chaque planche en acte de résistance culturelle. La mise en page joue magistralement avec la temporalité, alternant entre de petites cases répétitives pour figurer l’obsession et de grandes compositions contemplatives.

Cette adaptation dépasse le simple exercice d’illustration pour proposer une véritable réappropriation artistique du chef-d’œuvre de de Stefan ZweigDavid Sala réussit le tour de force de traduire visuellement l’angoisse existentielle et la résistance psychologique sans trahir la subtilité du texte original. Une belle bande dessinée pour les amateurs d’adaptations littéraires et fan de Stefan Zweig.

Frankenstein

Album publié en 2021 aux Editions Glénat.


Adapté du roman de Mary Shelley (publié pour la première fois le 1 janvier 1818).

couverture bd Frankenstein

Le cauchemar d’un monstre. La folie d’un homme.

Dans ce XIXe siècle d’innovations techniques et de révolution industrielle, la littérature anglaise a produit des figures fantastiques iconiques qui sont toujours vivantes aujourd’hui.
C’est le cas du Frankenstein de Mary Shelley et de son héros au destin tragique. Un proscrit rejeté de tous et en premier lieu par celui qui le façonna. De son délire narcissique est né un être colossal et effrayant qui témoigne de sa capacité à aimer, de son besoin de se relier et qui est condamné à la solitude, à la souffrance, à l’incompréhension et au rejet.
Car cette « chose » innommable, cette monstruosité, à qui la postérité donnera le nom de son créateur, est un agglomérat de cadavres auquel Victor Frankenstein a donné la vie.

Dans la lignée de son magistral Dracula, Georges Bess signe une adaptation somptueuse du Frankenstein de Mary Shelley. On y retrouve la magie de son noir et blanc profond et élégant qui sublime la dramaturgie du récit. Une œuvre grandiose, où le trait acéré et l’encrage puissant de l’auteur expriment dans chaque case le souffle romantique de cette histoire. Celle du cauchemar d’un monstre et de la folie d’un homme. Une pépite graphique incontournable. 


L’avis d’histoiregeobd.com sur la bande dessinée « Frankenstein »

Après son adaptation remarquée de « Dracula » en 2019, Georges Bess revisite un autre monument de la littérature gothique avec « Frankenstein » de Mary Shelley. Cette œuvre de 208 pages publiée chez Glénat en 2021 est bien plus qu’une simple transposition graphique du roman original.

Fidèle à l’essence du texte de 1818, Georges Bess abandonne simplement sa forme épistolaire pour mieux servir la narration graphique. Le dessinateur excelle à retranscrire la profondeur philosophique d’une histoire qui interroge la responsabilité du créateur face à sa création et explore les frontières entre humanité et monstruosité. La solitude poignante de la créature, ses désirs d’amour et d’acceptation prennent une dimension particulièrement touchante sous le trait de l’artiste.

extrait bd Frankenstein

Graphiquement, l’album est saisissant. Son noir et blanc, son encrage dense et son trait minutieux confèrent à chaque planche une dramaturgie intense. Georges Bess compose ses pages avec un sens aigu du détail, qu’il s’agisse des paysages glacés de l’Arctique ou de l’expressivité tourmentée des personnages. Son style, à la croisée des traditions des comics américains et du réalisme européen, donne à ce récit romantique une dimension à la fois classique et intemporelle.

Cette adaptation somptueuse séduira tant les amateurs du roman original que les néophytes avides de découvrir un chef-d’œuvre gothique magnifié par un dessinateur au sommet de son art. Une pépite graphique qui redonne vie, avec respect et génie, au cauchemar d’un monstre et à la folie d’un homme.

Un travail comme un autre

Bande dessinée publiée en 2020 aux éditions Sarbacane.


D’après le roman de Virginia Reeves  publié le 24 aout 2016.

couverture bd Un travail comme un autre

Le retour d’Alex W. Inker pour un roman graphique époustouflant dans l’Amérique de Steinbeck !

Alabama, 1920, Roscoe T Martin est fasciné par cette force plus vaste que tout qui se propage avec le nouveau siècle : l’électricité.
Il s’y consacre, en fait son métier. Un travail auquel il doit pourtant renoncer lorsque Marie, sa femme, hérite de l’exploitation familiale.
Année après année, la terre les trahit.
Pour éviter la faillite, Roscoe a soudain l’idée de détourner une ligne électrique de l’Alabama Power. L’escroquerie fonctionne à merveille, jusqu’au jour où son branchement sauvage coûte la vie à un employé de la compagnie…
La cellule d’un pénitencier, la décomposition d’un mariage, la terre impitoyable…
Une fable humaniste en résonance avec les questions économiques et sociaux actuels.


L’avis d’histoiregeobd.com sur la bande dessinée « Un travail comme un autre »

Adaptant le roman de Virginia Reeves, Alex W. Inker transpose l’action dans l’Alabama des années 1930 pour amplifier la portée dramatique de cette fable humaniste. L’auteur dépeint la chute tragique de Roscoe T. Martin, électricien contraint de devenir fermier, dont l’ingénieux détournement d’une ligne électrique se transforme en cauchemar judiciaire.

Alex W. Inker maîtrise parfaitement l’art de l’ellipse narrative, structurant son récit autour de dialogues minimalistes mais d’une authenticité saisissante. Le personnage de Roscoe, loin du héros traditionnel, révèle toute sa complexité humaine face aux épreuves : un anti-héros attachant broyé par un système impitoyable.

extrait bd Un travail comme un autre

L’auteur abandonne le sépia convenu des années 1930 pour une palette quasi orange fluo et bleu, inspirée des illustrés européens d’époque comme « Zig & Puce ». Cette bichromie surprenante, renforcée par un style semi-réaliste aux accents burlesques, crée une esthétique rétro singulière qui évoque subtilement l’uniforme carcéral américain.

Les cadrages variés et l’utilisation magistrale de pages muettes confèrent une dimension quasi cinématographique au récit. Cette adaptation constitue un roman graphique abouti, critique sociale percutante autant que BD visuellement remarquable.

Rémi Sans Famille

Bande dessinée publiée en 2018 aux éditions Glénat.


D’après le roman « Sans Famille » de Hector Malot publié en 1878.

couverture bd Rémi Sans Famille

Rémi, orphelin recueilli par la douce Madame Barberin, est arraché à sa mère adoptive pour être confié au Signor Vitalis, un mystérieux musicien ambulant. À ses côtés, il va apprendre la rude vie de saltimbanque et à chanter pour gagner son pain.
Accompagné du fidèle chien Capi et du petit singe Joli-Cœur, le long voyage de Rémi à travers la France, fait de rencontres, d’amitiés et d’entraide, le mènera au secret de ses origines…

Au moyen d’une mise en scène et une esthétique riche proche d’Hugo Cabret, le réalisateur Antoine Blossier offre dans ce film une vision raffraichissante du classique d’Hector Malot.
Ce grand film familial de fin d’année avec Daniel Auteuil, Virginie Ledoyen, Jacques Perrin et Ludivine Sagnier sortira en salles le 12 décembre. Afin de prolonger l’expérience, retrouvez l’adaptation du film en BD signée Cédric Simon et Éric Stalner.


L’avis d’histoiregeobd.com sur la bande dessinée « Rémi Sans Famille »

Rémi Sans Famille : quand le trait sublime l’émotion

Adaptation graphique du film éponyme (2018) inspiré du classique d’Hector Malot, « Rémi Sans Famille » signé Cédric Simon et Éric Stalner offre une relecture visuelle saisissante de cette quête identitaire intemporelle. En 56 pages denses et richement illustrées, les auteurs parviennent à capturer l’essence du récit originel.

La narration suit fidèlement l’histoire de Rémi, orphelin arraché à sa mère adoptive et confié au mystérieux Signor Vitalis, musicien ambulant qui l’initie à la vie de saltimbanque. Accompagné du fidèle chien Capi et du singe Joli-Cœur, son périple à travers la France du XIXe siècle dévoile progressivement le secret de ses origines.

extrait bd Rémi Sans Famille

L’album brille particulièrement par la maîtrise graphique d’Éric Stalner, dont le trait classique confère une remarquable profondeur aux personnages. Chaque visage incarne un caractère remarquablement défini. Les physionomies, reprenant les traits des acteurs du film, sont sublimées par les couleurs chaudes de Florence Fantini qui créent une atmosphère immersive proche de l’esthétique d' »Hugo Cabret ».

Le rythme soutenu bouscule parfois le lecteur d’une émotion à l’autre, cette contrainte n’altère en rien la densité émotionnelle de l’œuvre. La dimension universelle de ce destin dramatique et touchant reste intacte.

Une œuvre puissante qui séduira tant les amateurs du roman original que les néophytes, offrant une fenêtre esthétique somptueuse sur un classique de la littérature jeunesse française.

Pereira prétend

Album publié en 2016 aux éditions Sarbacane.


Résumé éditeur

D’après le roman d’ Antonio Tabucchi (Sostiene Pereira en italien) publiée en janvier 1994.

couverture bd Pereira prétend

Après Les Nuits de Saturne, Pierre-Henry Gomont nous emmène dans le Portugal de Salazar.

Lisbonne, Portugal, en pleine dictature salazariste, fin juillet 1938.
Dans une ville enveloppée d’un « suaire de chaleur », un journaliste vieillissant, le doutor Pereira, veuf, obèse, cardiaque et tourmenté, rédige chaque jour depuis plus de trente ans la page culturelle du quotidien très conservateur, le Lisboa.
Dans cette vie endormie, déboule un certain Francesco Monteiro Rossi… et, de façon tout à fait inattendue, Pereira l’engage. Mais le jeune pigiste, au lieu d’écrire les sages nécrologies que Pereira lui a commandées, lui remet des éloges aussi sulfureux qu’impubliables de Lorca et autres Maïakovski, ennemis avérés du régime fasciste.

Et là encore, au lieu de congédier ce dangereux collaborateur, le doutor Pereira le garde, se prend peu à peu d’amitié pour lui, puis pour sa mystérieuse et belle compagne, qui se révèle être une fervente combattante révolutionnaire, au service des républicains espagnols.

Devenue une œuvre emblématique de la résistance au totalitarisme et à la censure, Pereira prétend raconte la prise de conscience d’un homme confronté à la dictature. Ou quand un homme décide de se battre la plume au poing !

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L’avis d’histoiregeobd.com sur la bande dessinée « Pereira prétend »

Pierre-Henry Gomont signe avec Pereira prétend  une adaptation du roman éponyme d’Antonio Tabucchi publié en 1994. Cette bande dessinée transpose avec fidélité l’atmosphère oppressante du Portugal de Salazar de juillet 1938, où le doutor Pereira, journaliste veuf et obèse responsable de la page culturelle du quotidien conservateur Lisboa, voit sa vie bouleversée par sa rencontre avec le jeune Francesco Monteiro Rossi.

La BD excelle dans sa exploration de la prise de conscience politique progressive. Pierre-Henry Gomont matérialise les tourments intérieurs de Pereira en donnant vie à ses différentes « âmes » sous forme de petits personnages qui l’accompagnent, incarnation visuelle de la théorie de la « Confédération des âmes » évoquée dans le récit. Cette trouvaille graphique traduit avec le combat entre conformisme et résistance qui déchire le protagoniste face aux exactions du régime.

extrait bd Pereira prétend

Le trait de Pierre-Henry Gomont , vif et expressif, s’apparente aux peintures d’André Derain par sa spontanéité. Ses couleurs fortes et tranchées évoquent la chaleur lisboète avec leurs ciels azuréens et façades ocre ». La technique du halo blanc entourant chaque silhouette insuffle une énergie particulière. Cette esthétique transcrit parfaitement l’évolution du personnage, les décors se faisant plus flous dans la seconde partie pour accompagner ses transformations mentales.

Pereira prétend constitue un exemple parfait d’adaptation réussie, préservant la dimension anti-totalitaire du roman original tout en exploitant pleinement les ressources expressives du neuvième art. 

Les Voleurs de beauté

Bande dessinée publiée en 2018 aux éditions Glénat.


D’après le roman de Pascal Bruckner publié le 27 aout 1997.

couverture bd Les Voleurs de beauté

Leur jeunesse est un crime. Leur beauté, une malédiction.

Un soir d’hiver, Benjamin et sa fiancée Hélène sont pris dans une tempête de neige et trouvent refuge dans un chalet où un avocat aux allures de vieux beau vit avec sa femme et un petit homme repoussant qui leur sert d’homme-à tout-faire.
Ils sont bien accueillis, mais peu à peu, un poison se mêle au charme. Fasciné et épouvanté à la fois, Benjamin va découvrir par mégarde le secret des lieux : un boyau humide et souterrain où leur Barbe-Bleu d’hôte et ses complices enferment des êtres coupables d’un seul crime : la beauté.
Horrifié, hésitant entre l’incrédulité et la panique, Benjamin se retrouve alors pris au piège du trio monstrueux…

Philippe Thirault et le dessinateur espagnol Manuel Garcia adaptent le roman suave et cruel de Pascal Bruckner qui lui valut le prix Renaudot en 1997. Cette violente allégorie sur la jeunesse, la beauté et le sexe n’a rien perdu de son actualité à une époque obnubilée par le culte de l’apparence…


L’avis d’histoiregeobd.com sur la bande dessinée « Les Voleurs de beauté »

Une Sombre Allégorie sur le Culte de la Beauté

Philippe Thirault et Manuel Garcia nous offrent avec « Les Voleurs de beauté » une adaptation saisissante du roman de Pascal Bruckner, prix Renaudot 1997. Cette œuvre graphique explore avec finesse une intrigue aussi macabre que fascinante : un jeune couple pris dans une tempête de neige trouve refuge dans un chalet isolé. Leurs hôtes cachent un terrible secret – ils emprisonnent des êtres dont le seul crime est la beauté…

La narration, construite en alternant habilement présent et flash-backs, nous plonge dans une réflexion sur notre rapport obsessionnel à l’apparence. La structure en huis-clos accentue progressivement le sentiment d’oppression, tandis que la relation entre Benjamin, personnage principal, et Mathilde, l’infirmière à qui il confie son histoire, ajoute une dimension psychologique captivante. Philippe Thirault parvient à extraire l’essence du roman pour en faire un polar fantastique qui questionne nos peurs contemporaines face au vieillissement.

extrait bd Les Voleurs de beauté

Le style graphique de Manuel Garcia, à la croisée du franco-belge classique et des pulps américains d’horreur, sert admirablement cette fable cruelle. Ses contrastes marqués et ses expressions faciales d’un réalisme saisissant créent une atmosphère pesante qui colle parfaitement aux thématiques abordées. Chaque planche transpire l’angoisse, rendant palpable la terreur des protagonistes.

Véritable allégorie sur la tyrannie de la beauté dans notre société, cette bande dessinée saura séduire les amateurs de récits psychologiques teintés d’horreur, ainsi que ceux qui apprécient les adaptations littéraires aux résonances contemporaines.

Arsène Lupin contre Sherlock Holmes – 2ème Partie

Albums publiés en 2023 aux éditions Bamboo.


Résumé éditeur

L’adaptation libre du roman « La Barre-y-va » de Maurice Leblanc publié pour la première fois en 1931.

La dernière confrontation de deux légendes. 

En Normandie, un vieil alchimiste aurait percé le secret de la transformation du plomb en or. Il n’en faut pas plus pour attirer la convoitise d’Arsène Lupin, déguisé pour l’occasion en vicomte Raoul d’Avenac.
Le mystère que renferme le manoir de la Barre-y-va a-t-il à voir avec le mascaret qui se forme deux fois par an lors des équinoxes ?
Lupin/d’Avenac mène l’enquête. Mais ce que le gentleman cambrioleur ignore, c’est que Sherlock Holmes est sur ses traces. Le célèbre détective de Baker Street tente en effet d’éliminer Lupin, après avoir tué sa fiancée, seul moyen pour lui de garder secret ce crime et sa légende intacte.


L’avis d’histoiregeobd.com sur la bande dessinée « Arsène Lupin contre Sherlock Holmes – 2ème Partie »

Arsène Lupin contre Sherlock Holmes : L’ultime duel normand.

Ce second tome du diptyque de Jérôme Félix et Alain Janolle conclut brillamment la confrontation entre deux légendes littéraires dans une adaptation libre du roman « La Barre-y-va » de Maurice Leblanc. Quatre ans après la mort tragique de Raymonde, fiancée de Lupin, par la main de Holmes, leur affrontement final se cristallise autour d’un secret alchimique dans un manoir normand.

Le scénario enchevêtre habilement mystères et rebondissements, mêlant alchimie, crimes et phénomènes naturels comme le mascaret des équinoxes. Si l’intrigue peut sembler complexe, c’est justement ce qui fait sa force : comme dans un jeu d’échecs, chaque protagoniste anticipe les mouvements de l’autre. La tension dramatique monte inexorablement jusqu’à une confrontation sous la pluie magistralement mise en scène.

Graphiquement, Alain Janolle excelle dans la représentation des personnages et leurs multiples déguisements, tandis que Walter apporte une palette chromatique saisissante. Les bleus nocturnes et les verts profonds du bocage normand offrent une ambiance entre expressionnisme et mystère qui sert parfaitement le récit.

La conclusion, surprenante et audacieuse, réinvente avec intelligence la rivalité mythique entre ces deux figures. Un petit dossier documentaire sur les lieux réels ayant inspiré l’histoire complète parfaitement l’ensemble.

Une œuvre qui ravira tant les amateurs de BD policière que les aficionados des personnages de Maurice Leblanc et Conan Doyle, proposant une relecture moderne et stimulante de leur légendaire antagonisme.