Chronique des calanques : La dernière femme

Bande dessinée publiée en 2025 aux éditions Fedora.


couverture bd Chronique des calanques : La dernière femme

Alba, jeune femme préhistorique, ne vit que pour la chasse et se retrouve au désespoir lorsqu’elle apprend qu’une fois devenue femme elle devra renoncer à cette activité réservée aux hommes.
Révoltée, elle refuse cet avenir qu’on lui impose et s’engage alors dans une lutte contre la loi du clan.
Mais c’est vers le passé qu’elle va tenter de chercher des réponses et retrouver de l’espoir, plongeant jusqu’aux racines même des mystères de Terre-Mère : quels secrets cette grotte inondée et obscure mais remplie des ombres d’une époque bien différente renferme-t-elle ?  
Alba devra traverser bien des obstacles et des dangers pour trouver sa place dans ce monde.

Appréhender la grotte Cosquer telle que nos ancêtres du pléistocène la voyaient m’a toujours paru essentiel pour l’interprétation de ses œuvres. Ainsi, dès 2001, je proposais une étude pour tenter de restituer la façon dont les hommes préhistoriques avaient pu percevoir et utiliser ses reliefs, ses voûtes et ses parois grâce à leurs moyens d’éclairage primitifs. Mais comment rendre par la photographie toute la beauté et l’exactitude des ambiances lumineuses ainsi créées ?


Au début des années 2000, la sensibilité, la dynamique et la résolution des capteurs photos numériques ne s’y prêtaient pas et l’usage des films argentiques avait aussi ses propres limites. Joël Polomski, par la force et la précision de son dessin, nous invite enfin, avec une restitution parfaite, à la contemplation de ces décors fascinants. Oui, aujourd’hui, la plus juste représentation des ambiances souterraines que j’ai pu vivre en 30 ans de travail dans la grotte Cosquer se trouve dans les livres que vous avez en main.

Mais, que l’on s’y trompe pas, ce livre n’est pas qu’un simple récit, un de plus, sur une préhistoire fantasmée, où chacun projette ses certitudes pour combler les vides archéologiques. Non, il va bien au-delà, entraînant le lecteur, à travers une trame fondée sur la connaissance scientifique, à s’interroger sur comment « faire société ».

C’est une question délicate posée depuis l’apparition des premiers groupes humains et l’accroissement démographique, amenant l’auteur à nous proposer une redécouverte de la grotte Cosquer et ce moment critique de l’humanité lorsque celle-ci s’invente de nouvelles règles sous la pression du changement climatique et biologique mais où se développent aussi, avec la notion de propriété territoriale, la jalousie, la guerre et le patriarcat.
Ce livre est une réflexion sur notre passé et une inspiration pour notre avenir, nous rappelant l’importance de l’égalité et de la justice dans la construction de nos sociétés.


L’avis d’histoiregeobd.com sur la bande dessinée « Chronique des calanques : La dernière femme »

La BD de Joël Polomski nous transporte dans un récit, où la grotte Cosquer devient le théâtre d’une quête identitaire bouleversanteAlba, jeune chasseuse préhistorique rebelle, incarne une révolte fondatrice contre les interdits imposés par sa tribu. Privée de sa passion pour la chasse au moment de devenir femme selon les codes de son clan, elle entame une fuite existentielle qui la mène aux profondeurs mystérieuses d’une grotte inondée.

Joël Polomski déploie un récit initiatique où l’héroïne découvre, dans les ténèbres de la caverne, les traces d’un passé révélateur. Cette grotte-sanctuaire, évocation directe de la grotte Cosquer, devient un personnage à part entière. Les peintures rupestres et les vestiges qu’Alba y contemple lui révèlent l’existence d’autres femmes, libres et respectées, remettant en question l’ordre patriarcal de sa tribu. Cette dimension archéologique, rigoureusement documentée grâce à la collaboration avec Luc Vanrell, spécialiste reconnu de la grotte Cosquer, confère à la BD une authenticité saisissante.

extrait bd Chronique des calanques : La dernière femme

Le dessin de Joël Polomski, caractérisé par une approche picturale et minérale, sublime les paysages des Calanques. Ses tonalités ocres, bleutées et brunes évoquent avec justesse la roche, l’eau et la terre de ce territoire méditerranéen. L’auteur, reconnu pour son travail méticuleux et sa rigueur historique, alterne entre pages contemplatives et séquences dynamiques. Les scènes souterraines révèlent une maîtrise remarquable du clair-obscur, où l’obscurité et la lumière des torches dialoguent dans un jeu de textures presque tactile.

Joël Polomski évite les clichés d’un passé figé pour représenter la préhistoire comme un espace de tensions culturelles et de possibles subversions. Cette vision nuancée fait écho aux récentes découvertes archéologiques démontrant la participation active des femmes à la chasse préhistorique. L’auteur parvient ainsi à questionner la construction des rôles genrés dès les âges les plus anciens, transformant son récit en parabole sur l’émancipation féminine.

La sobriété du texte, souvent réduit au minimum, laisse le dessin porter l’intensité émotionnelle. Cette économie de texte renforce le pouvoir de suggestion de l’œuvre, particulièrement lors de la découverte des peintures pariétales. Joël Polomski offre ainsi une lecture alternative et sensible de la Préhistoire, où la grotte Cosquer devient le symbole d’une mémoire féminine universelle à redécouvrir.

Chronique des calanques : La dernière femme est une BD remarquable, qui allie rigueur scientifique et qui interroge notre rapport aux origines et à l’égalité.

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